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Mouctar Diallo : Mouctar Diallo: « Chaque fois qu’Abdoulaye Wade fait un tour en Guinée, le discours de Dadis se radicalise »

Sep 06, 2009

Depuis la prise de pouvoir le 23 décembre 2008, la junte guinéenne s’est lancée dans une campagne de moralisation de la vie publique, ouvrant des chantiers contre les narco trafiquants et les corrompus de l'administration. Aujourd’hui la transition bat de l’aile depuis que le chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara entretien le flou sur sa candidature à l’élection présidentielle. Le président des Nouvelles Forces Démocratiques (NFD) de Guinée, Mamadou Mouctar Diallo dénonce la “dérive dictatoriale” de la junte dans cet entretien avec AfricaLog.

AfricaLog: Certains observateurs vous trouvent comme la personne qui peut galvaniser la jeunesse guinéenne pour l’instauration de la démocratie dans le pays. Qu’est ce qui vous a motivé à assumer ce rôle aujourd’hui?

Mouctar Diallo : J’ai toujours eu la forte conviction que la Guinée doit changer. La Guinée doit être un pays normal comme tous les autre pays où la démocratie est une réalité où le peuple peut vivre de ses propres moyens en sécurité et sans crainte. Après avoir organisé des mouvements de jeunesses et participé activement à la lutte pour le changement lors des évènements de janvier et février 2007, je me suis dit qu’aujourd’hui il était temps d’influencer la gouvernance parce que le problème majeur de la Guinée est un problème de gouvernance. Et pour mieux y arriver, il faut être dans le cercle de la politique et de prise de décision.

AfricaLog: Est-ce qu’on peut admettre aujourd’hui qu’il y a une fracture au sein des forces vives?

Mouctar Diallo : Ecoutez, aujourd’hui, il n’y a pas de problèmes au sein du forum des forces vives de Guinée. Il fût un moment où il y avait des contradictions liées à des prises de position, chacun pensait que son idée était la meilleure. En fin de compte, toutes les organisations membres des forces vives savent unanimement aujourd’hui qu’il faut se mettre ensemble pour régler les problèmes politiques, économiques et sociaux du pays. C’est pour ça qu’on s’est réuni, les partis politiques, la société civile, les syndicats, les organisations du secteur privé, les coordinations régionales et religieuses en vue de préparer des élections libres et transparentes. Aujourd’hui tous les leaders des forces vives sont unanimes sur le fait qu’il y a une dérive dictatoriale de la part de la junte au pouvoir et qu’il faut absolument se mettre ensemble pour créer un bloc fort afin d’exercer une pression efficace pour contraindre la junte à respecter ses engagements pour des élections libres et transparentes où elle ne se présentera pas.

AfricaLog: D'après vous, quelles sont les forces et les faiblesses de l'opposition guinéenne face à la junte militaire?

Mouctar Diallo : Ce qui se passe c’est qu’au départ, les forces vives avaient soutenu la junte , lors de la prise du pouvoir par l’armée pensant que ça pouvait être une solution pour une transition efficace et apaisée. Aujourd’hui, les leaders se sont rendus compte que la junte veut s’éterniser au pouvoir et c’est pour ça qu’ils se sont réunis pour mettre la pression. La force aujourd’hui des partis politiques et des leaders des forces vives est que le peuple est avec eux. Ce qui est un facteur extrêmement important qui peut nous permettre d’avoir une influence positive et d’obliger la junte à respecter ses engagements.

AfricaLog: Les mouvements de soutien, les appels à une candidature du chef du CNDD (Conseil national pour la démocratie et le développement) traduisent-ils la volonté d'une majorité de guinéens à garder le CNDD au pouvoir au détriment de l'opposition, qui du reste n'inspire pas confiance?

Mouctar Diallo : Il y a certes, un petit nombre de guinéens qui est manipulé, instrumentalisé par Moussa Dadis Camara et son équipe en vue de susciter et de promouvoir sa candidature. Aujourd’hui, la junte est entrain d’acheter la conscience de certains guinéens qui sont bien sûr des opportunistes parce que avec les difficultés économiques, beaucoup de gens sont vulnérables. Et ça coûte des milliards à la junte, des milliards qui sont puisés dans les fonds publics. A côté, elle fait toute une propagande pour faire croire à l’opinion nationale et internationale que c’est la population qui veut la candidature de son chef; or cela n’est que manipulation et fausseté. La majeure partie des guinéens est unanime sur le fait que Dadis n’est qu’un manipulateur. Si le peuple l’avait acclamé, c’était à cause de son discours de rupture qu’il avait prononcé au lendemain de la prise de pouvoir; un discours qui dénonçait l’ancien pouvoir comme l’ensemble du peuple guinéen.

AfricaLog: Que préconisez-vous pour avoir des élections libres et transparentes en Guinée?

Mouctar Diallo : Au sein des forces vives, nous comptons travailler ensemble et avec la volonté du peuple pour contraindre la junte dans ce sens là. On compte évoluer dans le sens du chronogramme proposé par la junte et accepté par la communauté internationale. Mais aujourd’hui, la communauté internationale se rend compte que la junte est entrain de procéder à des stratégies de confiscation du pouvoir. Ce qui ne va pas marcher, parce que les stratégies des forces vives en accord avec les forces internationales sont entrain d’être mises sur pied pour forcer le pouvoir en place à organiser des élections libres et transparentes où il ne prendra pas part.

AfricaLog: Que pensez-vous du cas Mauritanien comme argument du capitaine Dadis?

Mouctar Diallo : Tout ça exprime la mauvaise foi du capitaine Dadis et son intention de s’accaparer du pouvoir. Au début, il citait les exemples de ATT (Amadou Toumani Touré, président du Mali) , mais aujourd’hui il ne parle plus de ce cas qui est un exemple lumineux qu’il pouvait suivre. Par contre il parle du cas mauritanien, ce qui explique ses rapports douteux avec Abdoulaye Wade qui était le médiateur du cas de la Mauritanie. Aujourd’hui nous nous inquiétons de l’implication active de Mr. Wade dans la résolution et la gestion de la transition en Guinée. Abdoulaye Wade n’est pas un bon choix, nous voyons qu’il est entrain de tuer la démocratie au Sénégal en portant des coûts durs à la liberté d’expression. Il déstabilise ses opposants politiques par exemple pour favoriser l’arrivée au pouvoir de son fils Karim Wade qui est aujourd’hui entrain de faire de l’Etat sénégalais une monarchie. La gravité de la situation est telle que, chaque fois qu’il fait un tour en Guinée, le discours de Dadis se radicalise. Et si Abdoulaye Wade va jusqu’à dire qu’en Guinée il n’y a pas eu un coup d’Etat, qu’il a fallut des gens patriotes comme Dadis pour sauver le pays, cela est extrêmement inquiétant. Donc, tout cela nous pousse, nous les membres des forces vives à être plus vigilant; à nous battre par tous les moyens pour une Guinée nouvelle, juste, démocratique, unie, et prospère.

AfricaLog: Serez-vous candidat à l'élection présidentielle de 2010?

Mouctar Diallo : Ça c’est une décision qui sera prise part le congrès du parti. Mon parti politique, (Nouvelles Forces Démocratiques) fonctionne de façon transparente et démocratique. Donc, ce n’est pas à moi de me déclarer candidat.


Propos recueillis par Chimène K. Siewe

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