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Critiques après le report de la présidentielle au Nigeria

Feb 08, 2015
Critiques après le report de la présidentielle au Nigeria

Le report de la présidentielle au Nigeria provoquait dimanche une pluie de critiques, observateurs et opposants du président sortant jugeant que sa popularité chancelante est la vraie raison de cette mesure, officiellement justifiée par les violences de Boko Haram.

La commission électorale nigériane (INEC) a annoncé samedi soir que les élections présidentielles et parlementaires, initialement prévues le 14 février, étaient reportées de six semaines, au 28 mars.

Les élections des gouverneurs et assemblées des États ont été également décalées de six semaines, au 11 avril.

Au total 14 candidats sont en lice pour la présidentielle qui, selon plusieurs analystes, devrait se jouer entre deux favoris: le chef de l'État sortant Goodluck Jonathan, 57 ans, sous les couleurs du Parti démocratique populaire (PDP) et l'ex-général Muhammadu Buhari, 72 ans, en compétition pour le Congrès progressiste (ACP), principale formation de l'opposition.

En repoussant les scrutins, l'INEC a cédé à des demandes officielles, y compris du chef du Conseil national de la sécurité (NSA), invoquant l'indisponibilité de forces de défense pour sécuriser le vote, en raison de leur engagement contre le groupe islamiste armé Boko Haram, qui sévit depuis six ans dans le nord-est du pays.

Cet argument n'a pas convaincu analystes et observateurs, soulignant que Boko Haram ne pouvait être défait en six semaines et que la sécurité des scrutins ne serait pas plus garantie.

D'après eux, les fondements de cette requête sont plutôt d'ordre politique, un nouveau délai pouvant bénéficier au PDP, qui dispose de plus de moyens pour mener une campagne électorale plus longue et permettre à M. Jonathan de regagner du terrain face à M. Buhari.
Pour d'autres analystes, le motif le plus valable pour un décalage du vote aurait été les difficultés de la distribution des cartes d'électeurs (PVC), un casse-tête logistique dans cette fédération composée de 36 États et un territoire fédéral (Abuja) avec près de 69 millions de Nigérians inscrits sur les listes sur une population globale de 173 millions d'habitants.

Mais samedi soir, le président de l'INEC, Attahiru Jega, a assuré que la commission électorale aurait été prête à organiser les scrutins à la date initiale, ayant déjà distribué près de 46 millions de cartes d'électeurs. Il a insisté avoir tenu compte des demandes liées à la sécurité, une «question cruciale qui ne dépend pas de l'INEC».

Pour l'expert nigérian Jibrin Ibrahim, du Centre pour la démocratie et le développement à Abuja, «les agences de sécurité ont forcé (l'INEC) à un report pour une raison complètement frivole».

«Si dans six semaines Boko Haram n'est pas défait, ils pourraient demander un autre délai et détruire définitivement la démocratie nigériane», a-t-il dénoncé.

Assurer un vote «sans crainte»

Le PDP, au pouvoir depuis la fin des dictatures militaires en 1999 et menacé, pour la première fois depuis 16 ans, par la perspective d'une alternance politique en faveur de l'APC, s'est félicité du report du vote, le jugeant «dans l'intérêt de la démocratie».
L'APC a de son côté dénoncé cet ajournement, y voyant «un recul majeur pour la démocratie nigériane», tout en appelant les Nigérians au calme.

Environ 20 associations de la société civile ont qualifié samedi l'incapacité de l'armée à se déployer pour les élections d'«abdication de ses obligations constitutionnelles», soupçonnant le dessein de «tronquer le processus démocratique au Nigeria».

Les États-Unis se sont dits «profondément déçus». Le secrétaire d'État américain John Kerry a critiqué l'usage de «problèmes de sécurité comme prétexte pour entraver le processus démocratique».

Dans un communiqué, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a exhorté les différentes parties concernées à tout mettre en oeuvre pour permettre des élections libres et équitables, et assurer «que les citoyens à travers le pays puissent accomplir leur devoir civique en toute sécurité et sans crainte».

L'indisponibilité des militaires pour sécuriser le scrutin n'avait pas été discutée jusque-là - les précédents votes ont toujours été placés sous la surveillance de la police et des milices civiles.

Le Tchad, le Niger, le Nigeria, le Cameroun et le Bénin se sont mis d'accord samedi pour mobiliser 8700 hommes dans une force multinationale de lutte contre Boko Haram, alors que le Tchad a déjà lancé ses troupes dans la bataille dans le nord-est du Nigeria.

En dépit de la pression militaire accrue, Boko Haram continue d'opérer au Nigeria et dans des pays voisins, comme dimanche matin, où ses combattants ont attaqué à la bombe Diffa (sud-est du Niger), ville frontalière, y faisant au moins un mort et dix blessés, selon des témoins et travailleurs humanitaires. – AfricaLog avec agence

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