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L'interdiction du burkini en France critiquée à l'étranger

Aug 17, 2016
L'interdiction du burkini en France critiquée à l'étranger

L'interdiction du burkini par des stations balnéaires françaises a reçu mercredi le soutien du premier ministre socialiste Manuel Valls, mais elle ne fait pas l'unanimité en France et est franchement critiquée à l'étranger.

L'épisode donne lieu à une énième polémique franco-française sur la laïcité, valeur brandie par les partisans de l'interdiction du burkini (contraction de burqa et bikini), notamment à droite, comme par ses opposants, plutôt à gauche.

Tout en repoussant l'idée de légiférer, Manuel Valls a dit «comprendre» et «soutenir» les maires de villes comme Cannes (sud) ou Le Touquet (nord) qui, dans un contexte de menaces d'attentats jihadistes et de montée des tensions interreligieuses, ont voulu «éviter des troubles à l'ordre public» en interdisant le burkini.

Trois femmes ont été verbalisées le week-end dernier à Cannes et ont dû payer une amende de 38 euros.

Ces maillots de bain enveloppants censés préserver la pudeur des femmes musulmanes sont très peu nombreux sur les plages françaises, noyés parmi les bikinis et maillots une pièce. Mais, selon Manuel Valls, leur apparition récente est «la traduction d'un projet politique, de contre-société, fondé notamment sur l'asservissement de la femme».

Le port du burkini «n'est pas compatible avec les valeurs de la France et de la République», a-t-il asséné dans un entretien au journal régional La Provence.
Des élus de droite, dont le député Thierry Solère, l'ont incité à aller plus loin et à mieux faire respecter l'interdiction de la burqa dans l'espace public, votée en 2010.

Le «premier ministre seul ne peut pas donner le «la» de la politique laïque de la France», a rétorqué le député socialiste Pascal Terrasse, en appelant à un débat «sans hystérisation».

Pour la Ligue des droits de l'Homme, Manuel Valls «participe à la stigmatisation d'une catégorie de Français, devenue, en raison de leur foi, a priori des suspects». «Ces manifestations d'autoritarisme (...) renforcent le sentiment d'exclusion et contribuent à légitimer ceux et celles qui regardent les Français musulmans comme un corps étranger à la nation», juge cette association fondée à la fin du 19e siècle en plein combat pour la laïcité.

Une opinion partagée par le porte-parole du parti communiste français Olivier Dartigolles: «d'une certaine manière», le chef du gouvernement «fait le jeu des terroristes puisque c'est très précisément ce qu'ils veulent, la guerre de religion, les tensions permanentes, le basculement vers la guerre civile».

Le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) a annoncé qu'il attaquerait en justice tous les arrêtés municipaux interdisant le port du burkini.

Le sociologue Michel Wievorka, souligne que cet épisode risque d'alimenter l'idée à l'étranger que la France n'est «pas capable de gérer raisonnablement, démocratiquement, par le débat, des questions comme la place de l'Islam» dans le pays.

Ridicule, discriminatoire envers les musulmans, contre-productive dans la lutte contre l'islam radical: les médias européens ne sont en effet pas tendres envers l'interdiction du burkini.

«Une fois de plus, les femmes sont instrumentalisées dans un combat idéologique (...) qui a pris un tour grotesque», écrit le quotidien berlinois TAZ.

Or, relève son compatriote le Sueddeutsche Zeitung (centre-gauche), «ce qui est interprété comme une islamisation rampante peut aussi être interprété comme un indice de participation accrue de femmes très croyantes à la vie publique. Celui qui va à la plage montre après tout qu'il est membre de la société».

«Il n'y a absolument aucune preuve que les femmes qui portent des burkinis sont en quoi que ce soit liées avec le terrorisme, et il n'y a aucune raison sur terre pour que leur interdiction aide à écraser les islamistes violents», souligne pour sa part le journal britannique conservateur Daily Telegraph. «Cela risque plutôt d'aliéner les musulmans modérés.».

En Italie, l'interdiction du burkini n'est pas à l'ordre du jour, a annoncé le ministre de l'Intérieur Angelino Alfano, défendant une approche «libérale» et «pragmatique».

Les autorités nationales d'un pays ont «la responsabilité de garantir la sécurité» sans tomber dans «une provocation qui puisse potentiellement inciter à commettre des attentats», a-t-il expliqué au Corriere della Sera, et «il ne me semble pas, hélas que le modèle français ait fonctionné au mieux». – AfricaLog avec agence

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