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Ouverture du procès en destitution de la présidente du Brésil

Aug 25, 2016
Ouverture du procès en destitution de la présidente du Brésil

Les sénateurs brésiliens ont lancé jeudi le procès en destitution historique de la présidente Dilma Rousseff, dont la très probable éviction tournerait la page de 13 ans de pouvoir de gauche à la tête de la première économie d'Amérique latine.

Les 81 parlementaires jugeront probablement mardi ou mercredi si l'ex-guérillera de 68 ans, actuellement suspendue, s'est rendue coupable de maquillages des comptes publics et d'avoir signé des décrets engageant des dépenses imprévues sans l'accord préalable du Parlement.

Une nette tendance se dégage en faveur de la destitution - par un vote requis des deux tiers - de Mme Rousseff, première femme élue à la tête du Brésil, qui fut emprisonnée et torturée sous la dictature militaire.

«Ma prévision est que 59 à 61 sénateurs se prononceront pour la destitution» alors que 54 sont requis, a déclaré le sénateur d'opposition Raimundo Lira.

Si les pronostics se confirment, c'est Michel Temer, 75 ans, son ancien vice-président de centre droit devenu rival, qui dirigera le Brésil jusqu'aux prochaines élections présidentielle et législatives fin 2018.

Tout aussi impopulaire que Mme Rousseff, il assure la présidence par intérim depuis qu'elle a été suspendue de ses fonctions, le 12 mai, par plus des deux tiers des sénateurs.

Le président du Tribunal suprême fédéral (STF) Ricardo Lewandowski, qui dirige les débats conformément à la Constitution, a ouvert le procès de Mme Rousseff dans la matinée en appelant les sénateurs, transformés en «juges» pour l'occasion, à «laisser de côté leurs positions idéologiques et partisanes».

Mme Rousseff, qui se défendra personnellement lundi devant le Sénat, clame son innocence, se disant victime d'un «coup d'État» institutionnel.

Elle a commis «la plus importante fraude fiscale de l'histoire du pays», a affirmé le sénateur Cassio Cunha Lima, du parti PSDB-PB (droite).

«Je vais voter pour l'impeachment, c'est l'instrument politique qui nous permet d'enlever le pouvoir à celui qui en fait un mauvais usage», a confié la sénatrice Simone Tebet (PDMB, centre droit).

«La destitution de Rousseff est une grande victoire de la démocratie, une libération de notre pays de la gauche qui voulait se maintenir au pouvoir», a affirmé Janaina Paschoal, une des trois juristes ayant déposé la demande d'impeachment.

Durant la première journée de cette session historique, les sénateurs de gauche ont soulevé des questions de procédure, toutes rejetées, puis plusieurs juristes ont été entendus comme témoins.

«Ce procès n'a pas de fondement juridique», a lancé la sénatrice Fatima Bezerra, du Parti des travailleurs (PT), fustigeant «un tribunal d'exception».

«Le jour de la honte nationale commence, le jour où les sénateurs commencent à déchirer la Constitution du pays et le jour où commence le châtiment d'une femme innocente», a clamé l'ex-président Luiz Inacio da Lula (2003-2010), mentor politique de Mme Rousseff, lors d'une réunion près de Rio.

«Quelle est la morale de ce Sénat pour juger Dilma Rousseff ?», s'est interrogée la sénatrice Gleisi Hoffmann (PT). Plus de la moitié des sénateurs présents, dont elle-même, sont soupçonnés de corruption ou font l'objet d'une enquête judiciaire.

Mercredi soir, Mme Rousseff avait appelé ses partisans, rassemblés dans un petit théâtre de Brasilia, à «garder espoir», promettant de se battre «avec la même force que quand j'ai lutté contre la dictature militaire».

Mais elle semble bien isolée, même dans son propre camp. Mercredi, la direction du PT a rejeté à une très large majorité sa proposition de consulter les Brésiliens par référendum sur l'organisation d'élections anticipées au cas où elle serait rétablie dans ses fonctions par le Sénat.

Sa probable destitution mettrait fin à 13 ans de gouvernements du PT, fondé par Lula.
L'ex-ouvrier devenu président a incarné un Brésil en plein boom socio-économique, dont les programmes sociaux ont sorti près de 40 millions d'habitants de la misère.

Il est aujourd'hui inculpé pour «tentative d'entrave à la justice» dans le scandale de corruption touchant le géant public pétrolier Petrobras, une affaire qui a éclaboussé tout autant le PT que le parti de M. Temer et la majeure partie de l'élite politique.

Et le «miracle» brésilien est révolu: le pays est entré en 2015 dans la pire récession depuis des décennies, sur fond d'inflation élevée, d'explosion du chômage - qui frappe désormais 11 millions de Brésiliens - et un déficit budgétaire de plus de 45 milliards de dollars.

M. Temer a profité d'une poussée conservatrice au Parlement à mesure que la grogne sociale montait, pour pousser son grand parti centriste (PMDB) dans l'opposition... et jouer sa carte personnelle. – AfricaLog avec agence

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