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Mongo Beti: l’iconoclaste

Mar 09, 2010

Dans les années 90, l'Afrique bouge dans tous les sens. Au rythme du vent de l'Est.  Les dictatures et le monolithisme basculent et laissent la  place au multipartisme. Le Cameroun est dans le bain. Mongo Beti, profite de cette mouvance politique pour retourner triomphalement au Cameroun. Sur invitation d'intellectuels proches de l'opposition que sont Ambroise Kom, Célestin Monga, Jean  Marc Ela. Mongo Beti remet ça quelque temps après. Fonde la librairie des peuples noirs, installée dans le quartier Tsinga à Yaoundé, et crée des plantations de bananes  plantains et de maïs à Akometam, son village natal. Mettant ainsi fin à 32 ans d'exil forcé en France.

C'est que  Mongo Beti est un écrivain engagé et contestataire. Il rédige des pamphlets qui mettent à mal les dirigeants coloniaux et néo-coloniaux.  Les régimes des présidents Ahidjo d'abord et Biya ensuite  ne le  portent pas en cÅ“ur. Durant toute sa vie, qui s'est définitivement achevée le 8 octobre 2001, Mongo Beti n'a eu que maille à partir avec les pouvoirs en place à Yaoundé. Pour avoir  osé protester contre le blocage de Yaoundé toute une journée pour permettre au président Biya de se déplacer dans la ville, Mongo Beti fut giflé par les policiers. Sans que cela n'émeuve la hiérarchie. Coopté  pour défendre  les couleurs du Social  democratic front  (SDF) dans la circonscription  de Mbalmayo  aux législatives  de 1997, l'administration lui déniera  la nationalité  camerounaise.

C'est donc  un indésirable  du pouvoir    qu'on cherchera  paradoxalement  à magnifier  lors de ses obsèques. Des messages de condoléances, gerbes de fleurs,  une enveloppe et la médaille  de chevalier  de l'ordre de la valeur  préparés par le pouvoir  seront envoyés aux cérémonies d'inhumation. Heureusement, Odile  Tobner, épouse Biyidi, elle aussi enseignante  et militante  de la première heure  sera là pour opposer  un refus catégorique, à la "reconnaissance" des autorités  camerounaises qui ont assez trop attendu  pour se  prononcer  sur  le cas Biyidi.

Iconoclaste

Né à Mbalmayo dans le Centre du Cameroun en 1932, Alexandre  Biyidi fréquente l'école de la mission  catholique. Son intelligence  pousse le père Gaschy à l'inscrire  en 1943 au pré-séminaire d'Akono. Malheureusement, un an après, il est exclu pour indiscipline. En 1947, il intègre le collège  moderne mixte  de Yaoundé  où il rencontre  Ossendè Afana, militant de l'Union  des populations  du Cameroun (UPC). Cette rencontre  fait un effet sur Mongo Beti,  qui adhère   les thèses de l'UPC qui lutte pour l'indépendance  immédiate  du Cameroun. Boursier de l'Etat du Cameroun en 1951 après son BACC littéraire, il s'inscrit à la faculté des lettres de l'université d'Aix-en-Provence en France. C'est de là  qu'il rédige son premier roman en 1954, " ville cruelle" sous le pseudonyme de Eza Boto. 

En 1959, Mongo Beti, après avoir décroché son capes est recruté dans l'enseignement en France. Il travaille aux lycées Rambouillet, Hélène Bouchet, Lambelle, avant d'être reçu en 1966 au concours d'agrégation. Par la suite, il est nommé professeur de lettres au lycée Corneille à Rouen. Sous le nom de Mongo Beti, Alexandre Biyidi se lance définitivement dans une carrière d'écrivain et publie  plusieurs ouvrages  qui sont :   « Le  pauvre  Christ de Bomba »,1956; « Mission terminée », 1957 ; « Le roi miraculé »,1958 ; « Remember Ruben », 1974 ; « Main basse sur le Cameroun »,  1972; « Perpétue et l'habitude  du malheur », 1974 ; « Ruine presque Cocasse d'un polichinelle », 1979 ; « Les deux mères de Guillaume Ismaël Dzewatama », 1983 ; « La revanche   de Guillaume Ismaël Dzewatama », 1984 ;  «  Lettre ouverte  aux Camerounais  ou la deuxième  mort de Ruben Um Nyobè » , 1986 ; « Dictionnaire de la négritude »,  1989 ; « La France  contre l'Afrique,  retour au Cameroun », 1993 ; « L'histoire du fou », 1994 ; « Trop de soleil tue l'amour »  , 1999 ; « Branle Bas  en noir et blanc », 2000.

La bibliographie de Mongo Beti   est inépuisable  et fait partie  des meilleures d'Afrique. Les Occidentaux  le reconnaissent  en  sourdine, même  s'ils ne  lui ont jamais  attribué  un quelconque prix. A preuve,  ses Å“uvres  sont étudiées  en France. C'est sa trop grande  liberté d'expression et d'esprit qui aurait poussé  les attributaires  de prix à se méfier de l'«iconoclaste». – AfricaLog

 

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