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Présidentielle guinéenne: l’armée sera-t-elle républicaine?

Jun 15, 2010

Ces récents jours en Guinée, plusieurs militaires gradés ont été mis aux arrêts, puis libérés par la suite. Le chef d’état-major de l’armée, Nouhoun Thiam, a évoqué des problèmes de gestion pour justifier la mise sous verrou de ces officiers. Affaire banale donc ? Pas si sûr dans un pays où l’armée a toujours été au cœur du pouvoir :

sous Sékou Touré, elle a eu beau essayer, avec l’aide de l’impérialisme, de le renverser, mais le Silly réussissait toujours à échapper aux multiples tentatives de coups d’Etat, réels ou fictifs. On affirme d’ailleurs que c’est lorsqu’il a eu à ses côtés un certain Lansana Conté que le premier président guinéen a pu dormir du sommeil du juste ; pluôt comme tel, puisqu’il y avait les mercenaires qui, de façon itérative, grenouillaient ;

lorsque le général Lansana Conté accède à la magistrature suprême en avril 1984 après le décès de Sékou Touré, il y eut comme une épidémie de putschs qui capotèrent tous. Quelques exemples méritent d’être cités : d’abord quelques mois après l’irruption de ce quarteron de colonels dans l’arène politique, les trahisons se firent jour.

Le colonel Diarra Traoré, presque alter ego de Conté, et quelques compagnons qui étaient ses proches, tentèrent de lui faire un contre-coup. Mal leur en prit, car c’était sans compter avec les ressorts de Conté, qui connaissait à fond la grande muette, et les félons furent fusillés ;utôt la grande estime, dont bénéficiait Conté au sein des soldats le sauva du coup d’Etat du 2 février 1996. Ce putsch avait réussi.
Lors de ce mouvement d’humeur de la soldatesque, qui réclamait une augmentation de solde et d’autres avantages, Conté perdit le pouvoir pendant quelques heures. Il réussit la prouesse de le reprendre en rencontrant les militaires et en acceptant de satisfaire toutes leurs revendications, et séance tenante, il fut acclamé ce jour-là ;

le troisième président, Dadis Camara, eut moins de chance, puisqu’il failli être envoyé ad patres par son aide de camp le fantomatique "Toumba" depuis. On le constate donc, en Guinée, l’armée et le pouvoir, "c’est ton pied, mon pied".

Sans toutefois préjuger des réels motifs des arrestations de ces derniers jours, on peut en tout cas subodorer qu’elles tombent mal : à une dizaine de jours d’un scrutin aussi majeur et historique que la présidentielle du 27 juin 2010.

Dans un pays ou l’armée nécessite d’être formatée pour rentrer dans le moule républicain, et à quelques encablures d’une présidentielle, il s’agit d’une erreur. Et Sékouba Konaté, le chef de l’Etat intérimaire, qui a promis de discipliner ses camarades par la carotte, devrait les caresser dans le sens du poils.
D’où la réintégration et la réhabilitation de 80 officiers, rayés des bataillons sous Conté il y a quelques années de cela. Pour réussir cette transition ainsi que le vote de juin et, surtout, brider l’ardeur d’une armée putschiste, il faut se garder de la vexer.

Les militaires sont aujourd’hui un élément-clef du puzzle de la transition guinéenne. Et l’ère Dadis n’est pas si éloignée, ni le massacre à huis clos au stade du 28- Septembre.

En attendant que la communauté internationale aide cette armée à faire sa mue, c’est-à-dire à être désormais respectueuse des institutions républicaines et prête à accomplir ses traditionnelles missions régaliennes, il faut l’encourager à accompagner le présent processus politique.
Officiellement, si les militaires n’ont pas leur mot à dire dans cette transition, ils en constituent le garant avant et après le scrutin. Ce n’est pas sans raison qu’il est question de garder le général Sékouba Konaté comme ministre de la Défense dans le prochain gouvernement pour parachever cette réforme de l’armée. – L’observateur Paalga

 

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