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Le jeu discret de Paris pour tourner la page à Abidjan

Apr 01, 2011

La France a appelé vendredi Laurent Gbagbo, «à se retirer immédiatement, à faire cesser les violences et à céder le pouvoir pacifiquement».

Surtout, éviter de monter en première ligne pour ne pas donner prise aux arguments de Laurent Gbagbo. Après les résultats de la présidentielle ivoirienne du 28 novembre , auxquels le chef de l'État sortant refuse de se plier, la France trace la ligne diplomatique qui, après quatre mois de statu quo, a fini par placer Gbagbo dos au mur. Une stratégie payante, même si le sort de l'ex-homme fort d'Abidjan, dont Nicolas Sarkozy s'est entretenu vendredi à l'Élysée avec François Fillon, Alain Juppé et Gérard Longuet, restait incertain. «Les responsables d'exactions n'échapperont pas à leur responsabilité pénale», a prévenu la présidence française dans un communiqué.

Détestation cordiale

Activisme et discrétion - c'est en marchant sur ses deux jambes que Paris a pu jouer un rôle moteur pour tourner la page d'une décennie de relations chaotiques, et souvent exécrables, avec Abidjan. Nicolas Sarkozy, qui s'est entretenu vendredi soir avec Alassane Ouattara, voue une détestation cordiale à Laurent Gbagbo. Surtout, davantage que Jacques Chirac, il a pris la mesure de l'habilité manuvrière sans limite de son homologue ivoirien qui, depuis son Palais présidentiel du Plateau, tire les ficelles du ressentiment à l'égard de l'ancienne puissance coloniale. Pourtant, l'homme pressé de l'Élysée tarde quelque peu à prendre la mesure du «temps africain». Ainsi, le jeudi 17 décembre, il somme Laurent Gbagbo de quitter le pouvoir «avant la fin de la semaine». En vain

Face aux arguties et aux intimidations du madré Ivoirien, une posture plus constante s'avérera payante. À chaque occasion, Paris réaffirme sans ambiguïté que le pays ne compte qu'un président légitimement élu, Alassane Ouattara. Fin janvier, pour appuyer ce message, l'Élysée fait en sorte que le nouvel ambassadeur ivoirien à Paris, Aly Coulibaly, un proche de Ouattara présente ses lettres de créances quelques jours après sa nomination, une procédure inhabituelle.

Pour Paris, il faut donner le premier rôle aux instances internationales. Dès le 29 décembre, la France soutient la mise en œuvre par l'Union européenne d'interdictions de visa contre Gbagbo et son entourage. Le même jour, le Conseil de sécurité vote la reconduction du mandat de la Force des Nations unies en Côte d'Ivoire (Onuci), qui compte 10 000 personnes. Vendredi, Paris annonçait un renfort de 150 hommes à la force Licorne, la portant à 1 100 soldats environ, pour protéger les Français et autres étrangers sur place . Toute aide militaire à Ouattara est démentie. «Ce serait un non-sens pour lui et pour nous», soulignait Alain Juppé, en janvier, encore à la Défense. Et d'ajouter : «Nous ne ferons rien sans une décision des Nations unies.» De fait, en Côte d'Ivoire comme en Libye, l'ONU est un passage obligé. Avec le Nigeria, membre du Conseil de sécurité et président de la Cédéao, la France fait voter, le 30 mars, la résolution 1975 qui renforce les sanctions contre Gbagbo et exige son départ. Le président désavoué par les urnes est pris au piège qu'il ne cessait de tendre à la communauté internationale, celui de la persévérance. Les sanctions finissent par agir : fin mars, il n'a pu payer les soldes de l'armée. L'Afrique du Sud et l'Angola l'ont lâché. L'offensive éclair d'Alassane Ouattara a fait le reste. Et en coulisse, Paris a pu tirer le rideau. – Le Figaro
 

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