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«Je n'ai rien mangé depuis deux jours»

Feb 07, 2012

«Je n'ai rien mangé depuis deux jours»: bouche desséchée et visage couvert de poussière, la Malienne Nako attend qu'on lui vienne en aide, comme ses compatriotes réfugiés avec elle dans l'ouest du Niger et chassés par les combats au Mali.

«Donnez-nous un peu à manger, j'ai aussi des vertiges», lance-t-elle à une équipe de l'ONG Médecins sans frontières (MSF) venue recenser les enfants souffrant de malnutrition.

Cette Touareg quinquagénaire en turban noir est venue à pied du nord du Mali avec trois soeurs à Chinégodar, village nigérien à 10 km de la frontière. S'y sont réfugiées environ 6000 personnes, en majorité des Touareg, depuis l'offensive des rebelles maliens le 17 janvier - la première depuis 2009 - et leurs combats avec l'armée.

Dans le village aux petites maisons de terre ocre, qui compte d'ordinaire 1600 âmes, cet afflux de population a engendré une sévère pénurie d'eau du fait de «l'assèchement de l'unique puits d'eau potable», explique le chef du village, Abdoulaye Mohamed.

Les vivres manquent aussi. «Nous avons partagé avec eux le peu de nourriture, il n'y a plus rien à manger», affirme-t-il.

La région, l'une des plus arides du Niger, est frappée par la crise alimentaire qui touche cette année encore une large partie du pays, pour cause notamment de sécheresse.

Dans le camp de réfugiés situé sur un terrain à l'écart, la vie tourne au cauchemar.

«La majorité des gens ne se lavent plus, dorment à la belle étoile à la merci du vent, des nuits glaciales, des scorpions et des serpents», alerte Boureima Issaka, de l'ONG nigérienne Timidria.

Pour se protéger du soleil accablant comme du froid des nuits, des abris ont été montés avec des couvertures et des pagnes, mais le dénuement est total.

«une catastrophe humanitaire si rien n'est fait»

«Dans le sauve-qui-peut, personne n'a pu emporter des effets personnels», dit Akouli, un instituteur venu d'Adramboucar, localité malienne occupée depuis fin janvier par les rebelles, à 8 km de la frontière.

Vêtue en haillons, Koundouassan, une jeune mère, peine à nourrir son bébé de deux mois.

«Comme je ne mange plus assez, je n'ai plus de lait».

Atteint d'une toux chronique, le petit Al-Housseïni, assis sur une natte, a déjà perdu quelques kilos depuis son arrivée. Comme la quasi-totalité des enfants, il souffre «de malnutrition et de déshydratation», selon Foureyra Hassane, l'infirmière du village.

«Ces enfants ont affreusement faim, on peut entendre leurs pleurs toutes les nuits», témoigne Balki, une résidente de Chinégodar qui partage avec dix réfugiés sa modeste maison.

Des réfugiées partent très tôt en brousse pour cueillir des fruits sauvages ou les gousses du «dani», une plante épineuse consommée en période de disette.

Mohamed, lui, tente de consoler sa femme qui vient de perdre son enfant lors d'une fausse couche. «Elle était enceinte de quatre mois et avait une forte fièvre», raconte ce quinquagénaire.

Malgré cette détresse, l'aide tarde à se déployer, tandis que la crise a interrompu les échanges entre Chinégodar et la région malienne de Menaka, principale source de ravitaillement en produits de première nécessité.

Pour l'heure, la mairie a offert 500 kg de céréales, MSF a apporté quelques cartons de médicaments et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) travaille à la fourniture en eau.

Une mission des Nations unies s'est rendue la semaine dernière à Chinégodar et a constaté les conditions «extrêmement difficiles», notamment l'hygiène «déplorable», qui font craindre une épidémie de choléra.

«Il faut redouter une catastrophe humanitaire si rien n'est fait», s'alarme Boureima Issaka. – AfricaLog avec agence
 

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