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Dialogue: Les leaders de l’opposition et le cas de la CENI

Feb 17, 2012

«Le récent appel à la "ville morte" était une alerte au gouvernement », souligne Sidya Touré de l’UFR.

La question de la CENI continue à diviser la mouvance présidentielle et l’opposition. Pour la première, on ne saurait parler de restructuration ou de réforme quelconque d’une CENI qui a dirigé l’élection présidentielle de 2010, considérant que l’organisation des prochaines législatives s’inscrit dans le même processus électoral. Quant à la seconde, la CENI dans sa structure actuelle n’est qu’une machine à «favoriser la fraude au profit du pouvoir lors des prochaines consultations électorales».

Pour Antoine Gbogolo Soromou, Président de l’AND, mouvance du pouvoir, «le cadre de ce dialogue est de respecter la loi, nous respectons la loi. Puisque l’opposition a besoin d’être rassurée pour aller aux élections, puisqu’aucun texte ne nous permet de toucher à la CENI, il faudrait créer une cellule d’appui technique au sein de laquelle tous les partis vont être représentés pour effectivement contrôler tout le processus pour que nous ayons des élections transparentes.»

Face à la guéguerre qui fait donc tirer le dialogue en longueur au palais du peuple, quelques leaders de l’opposition étaient face aux journalistes à La Maison de la presse, le jeudi 16 février 2012. Cette conférence de presse avait pour thème «Déroulement du dialogue politique au Palais».

Il s’agissait pour ces leaders de «dénoncer le blocage» de ce dialogue politique tout en estimant que «l’impasse est imputable au pouvoir».

- Sidya Touré, leader de l’UFR: «Le gouvernement en place refuse de reconnaitre la parité de représentation au niveau de la CENI. Que l’on change les Conseils communaux et les Conseils ruraux, que l’on remplace tous les responsables de l’administration à l’intérieur du pays par des fonctionnaires du RPG, il est perceptible aujourd’hui, partout où vous vous rendez en Guinée, que cette pression demeure et c’est visible qu’on veut absolument faire en sorte que les élections soient menées de bout en bout par un seul parti. Les démembrements de la CENI, la Commission Electorale Nationale Indépendante, ont été changés sur l’ensemble du territoire. Partis de 40% d’opposition, 40% du gouvernement, nous sommes aujourd’hui à 75% du gouvernement et à 12% seulement de l’opposition.

Et si on sait que ce sont ces démembrements de la CENI qui nomment les Présidents des bureaux de vote, qui désignent les scrutateurs, qui font la compilation, qui transportent les résultats du vote, vous comprenez bien, qu’il se prépare à un hold-up électoral que nous dénonçons et qui devait faire en sorte que tout le monde se ressaisisse afin que ce dialogue permette de donner un résultat consensuel qui évite un dérapage à notre pays. C’est le sens de notre volonté d’aller de l’avant mais nous n’accepterons non plus n’importe quoi.»

- Cellou Dalein Diallo, Président de l’UFDG: «Sur les quatre groupes [politiques de discussion, ndlr], trois groupes sont d’accord pour la restructuration ou la recomposition de la CENI. Le Centre, de manière partielle. C’est-à-dire, ceux qui ont été condamnés en l’occurrence Lounsény et el hadj Boubacar, on les remplace. Et l’opposition et l’ADP, qu’on restructure pour rétablir la parité.

Il convient de rappeler, pourquoi la parité. C’est pour que les parties en compétition, le pouvoir et l’opposition, soient représentés dans la CENI.»

Quelle stratégie pourrait être envisagée au cas où le blocage que l’opposition impute au gouvernement persistait ?

Sidya Touré estime: «Le premier moyen, c’est de refuser ce qui est en train de se faire. C’est la raison pour laquelle nous sommes aujourd’hui en train de discuter avec le gouvernement ».

Toutefois, l’orateur de souligner que le récent mot d’ordre d’appel à la "ville morte" était "une sorte d’alerte" à l’endroit du gouvernement : «attention, nous sommes-là. Nous représentons près 70% du corps électoral au premier tour de l’élection présidentielle. Nous n’accepterons pas que ces élections soient complètement bidouillées et que nous ayons des résultats ne correspondent pas à la réalité de nos différents votes.»

- Aboubacar Sylla de l’UFC: «Nous avons dit que la CENI a été créée, organisée par une loi, la loi 013. C’est cette loi qui a créé la CENI et fixe les conditions dans lesquelles la CENI est composée, les conditions dans lesquelles elle fonctionne. Cette loi prévoit qu’il y ait une représentation paritaire de l’opposition et de la mouvance présidentielle en son sein, à l’article 10 : 40% pour la mouvance présidentielle, 40% pour l’opposition, 12% pour la société civile et 8% pour l’administration.

Nous avons demandé au niveau du cadre de dialogue que la loi soit respectée sur cette question. Parce qu’il ne s’agit même pas de restructuration, de recomposition, mais c’est le contenu de ce que nous demandons qui est important. Et le contenu est une recomposition de la CENI. On ne veut pas revenir sur les attributions de la CENI ainsi de suite, tout ce qu’on demande, c’est à ce que les membres de la CENI reflète le paysage politique actuelle conformément à la loi 013».

Ainsi qu’on le voit, la question de la CENI a occupé une grande part de cette conférence de presse. Ils ont tenu à souligner qu’ils ne boycotteront pas les élections législatives mais empêcheront leur tenue tant que ne sera pas satisfait leurs desiderata.

C’est du moins, le point de vue de Cellou Dalein Diallo, Président de l’UFDG:

«Il n’y a pas un accord, il n’y aura tout simplement pas d’élection. Maintenant, comment on va faire? Ça, on le dévoilera le moment venu.

Mais on avait demandé à Monseigneur [Albert Gomez, Président du comité de facilitation, ndlr] lorsqu’il nous a dit de venir demain, "est-ce que la CENI suspend ses activités ?", il nous a dit "oui, elle suspend jusqu’à dimanche". Je ne sais pas si c’est fondé ou pas ; en tout cas l’affirmation avait été faite par Monseigneur Gomez hier [mercredi 15 février, ndlr] qu’elle suspend jusqu’à dimanche [19 février 2012, ndlr]».

Face justement au Comité de facilitation, l’heure serait à la déception de la part des leaders.

Certains ne se sont pas empêchés d’exprimer ce sentiment, comme Lansana Kouyaté, leader du PEDN:

«Ce qui est regrettable et là, c’est mon intuition personnelle, lorsque le Président [de la République, ndlr] a finalement accepté …, qu’il ait suggéré des facilitateurs qui étaient en toute évidence, nous avons proposé l’équipe actuelle. Donc, nous sommes forcément déçus. J’aurais tort de vous dire qu’on n’est pas déçus.

Mais la déception était perceptible au départ parce qu’il a dit qu’il était facilitateur. Pour l’instant le sujet le plus ardu, on est aujourd’hui jeudi. Vendredi, samedi, dimanche. Lundi, la CENI va reprendre. Si la CENI reprend, nous nous retrouverons, nous en tirerons les leçons.»

Et M. Kouyaté de s’interroger sur un éventuel appel au départ du Président du Comité de facilitation:

«En trois jours, demander le départ de Monseigneur Gomez ou même ne pas demander, lui-même il l’avait dit au départ. C’est ce qu’il avait dit au Président [de la République, ndlr] : "si j’arbitre et que nous trouvons un côté a raison, l’autre n’a pas raison et qu’il ne veut pas céder, on démissionne". Nous, nous attendions un peu à ça. Puisqu’il ne nous a pas donné ce plaisir, dans trois jours, je ne vois pas comment on peut le remplacer ! Puisque de toutes les façons, plus que sa personne, il y a un blocage réel. C’est parce qu’il va prendre des ordres qu’il veut respecter vaille que vaille.»

De son côté Sidya Touré de l’UFR regrette: «La médiation nous dit non. Mgr Gomez nous dit : "non, non, non, moi, mon rôle, ce n’est pas du tout de rapprocher les points de vue, c’est de montrer les divergences". Mais les divergences, nous les connaissons avant. Comment voulez-vous que nous venions vous présenter les résultats d’un dialogue ? Il n’y a pas eu en réalité un dialogue. Nous sommes allés dans la salle et chacun a défini quelle était sa position.

Aujourd’hui, ce qu’on peut vous dire, c’est qu’on a constaté que les divergences étaient-là et aucune solution n’est entreprise pour rapprocher les points de vue. Le dernier point sur lequel nous sommes actuellement accrochés, c’est le problème de la CENI. Mais tous les points qui devaient être évoqués au cours de ce dialogue n’ont pas trouvé de solution, n’ont même pas été évoqués parfois. Nous parlons tantôt de Fichier électoral, mais il en est de même du problème des Conseillers communaux [démis par le pouvoir, ndlr], du problème de la liberté de circulation. Tous trois ici, [parlant des trois leaders politiques Sidya, Cellou et Kouyaté, ndlr] on a été contrés là où on a été, quand vous voulez tenir un meeting, vous avez la police, la gendarmerie, la Fossepel qui sortent de je ne sais où, pour venir vous dire que "non, on ne peut pas faire de rassemblement". Tout ça fait partie des points dont on devait parler. On n’en parle pas.»

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