Ken Saro-Wiwa: “Seigneur, prends mon âme, mais la lutte continue.” | Up Close | www.africalog.com
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Ken Saro-Wiwa: “Seigneur, prends mon âme, mais la lutte continue.”

Feb 25, 2010

"Lord take my soul, but the struggle continues" sont les derniers mots de l'Ă©crivain, professeur d'universitĂ©, producteur de sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ© et dĂ©fenseur de l'environnement  Kenule (Ken) Beeson Saro-Wiwa. NĂ© en Octobre 1941 Ă  BorĂ© au Nigeria, on ajouta Saro Ă  son nom parce qu'il Ă©tait le premier garçon de sa famille.

En 1958 la compagnie Britannique Shell dĂ©couvre du pĂ©trole dans le delta du Niger. Ken encore jeune observe la destruction de l'environnement et l'exploitation des ressources de sa rĂ©gion natale. Après des annĂ©es de protestation sans succès Ă  travers ses articles dans la presse nigĂ©riane, Ken dĂ©cide de fondĂ© le MOSOP (the MOvement for the Survival of the Ogoni People) en 1990. Ce mouvement pacifique  organise des protestions contre la dictature nigĂ©riane et la compagnie Shell. 

Shell et ses associés du régime militaire s'inquiètent des activités du leader du MOSOP. Il sera arrêté à plusieurs reprises et relaxé.

Le 21 Mai 1994 Ken et huit  de ses collègues du MOSOP sont arrĂŞtĂ©s et accusĂ©s d'avoir tuĂ© quatre chefs Ogoni. Un des quatre chefs Ă©tait son beau frère.  

En Février 1995 après dix mois de torture, le régime militaire décide enfin de juger Ken.

Le 31 Octobre 1995 Ken et ses camarades sont condamnés à mort par la dictature Nigériane et exécutés par pendaison le 10 Novembre 1995.

La lettre de Ken Saro-Wiwa rédigée en prison, résume sa vie et son combat

Mai 1995

Une annĂ©e s'est Ă©coulĂ©e depuis que j'ai Ă©tĂ© brutalement rĂ©veillĂ© de mon lit et dĂ©tenu. Soixante-cinq jours enchaĂ®nĂ©s, des semaines affamĂ©s, des mois de torture psychologique et rĂ©cemment, le parcours dans une voiture asphyxiante pour comparaitre devant une court de kangourou surnommĂ© tribunal militaire spĂ©cial oĂą les dĂ©bats ne laissent aucun doute que le jugement a Ă©tĂ© Ă©crit d'avance. Et il n'y aura certainement pas d'appel contre la condamnation Ă  mort. 

 Peur affreuses? Ă€ peine. Les hommes qui dĂ©crètent et surveillent ce spectacle de honte, cette charade tragique, ont peur du message, du pouvoir des idĂ©es, le pouvoir du stylo; des demandes de justice sociale et des droits de l'homme. Ils n'ont pas le sens de l'histoire. Ils ont si peur du pouvoir du message, leurs obsèques. 

 Lorsque, après avoir Ă©crit pendant des annĂ©es, j'ai dĂ©cidĂ© de mobiliser le peuple Ogoni par le message dans la rue, et permettre Ă  ce peuple de protester contre la dĂ©vastation de l'environnement par Shell, la deshumanisation de l'environnement par les dictateurs NigĂ©rians, je n'avais aucun doute oĂą cela pouvait se terminer. Cette connaissance m'a donnĂ© la force, le courage, la rĂ©jouissance et un avantage psychologique sur mes bourreaux. 

Hier, comme par voie magique, l'esprit Ogoni a apparu dans ma cellule, un beau poème de Jack Mapanje, le vĂ©tĂ©ran des prisons de Kamuzu Banda: quatre annĂ©es sans aucune charge. J'avais rencontrĂ© Jack Ă  Potsdam en 1992 et je me suis demandĂ© comment il avait survĂ©cu Ă  tout cela. 

 Ă‰crivant de Leeds University, son poème m'a conseillĂ© de porter l'armure de l'humour. La note Ă  la fin Ă  Ă©galement Ă©tĂ© signĂ©e par Chengerai Hove, le romancier primĂ© du Zimbabwe. Cela fait plaisir de savoir que ces hommes excellents, les meilleurs cerveaux s'inquiètent de la souffrance de l'autre. 

 Finalement la faute se trouve chez le gouvernement britannique. C'est le gouvernement britannique qui fournit des armes et de l'argent aux dictateurs du Nigeria, sachant que ces armes seront utilisĂ©s contre les citoyens innocents, non armĂ©s. 

 C'est le gouvernement britannique qui fait des bruits au sujet de la dĂ©mocratie au Nigeria et en Afrique mais soutient les dictateurs Ă  fond. C'est le gouvernement Anglais qui supporte le viol et la dĂ©vastation de l'environnement par une Compagnie de grande valeur comme Shell qui possède des employĂ©s et paie ses impĂ´ts. Mon agonie, la destruction des Ogoni et des autre peuple du delta du Niger, sont la responsabilitĂ© du gouvernement britannique. 

 Finalement, la dĂ©cision revient aux britanniques, l'Ă©lectorat, d'arrĂŞter, cette grande supercherie, ce double standard qui a prolongĂ© le cauchemar de l'Afrique et dĂ©nigre l'humanitĂ©. 

 Vivre ou mourir est immatĂ©riel. C'est un comble pour moi de savoir qu'il y a des gens qui sacrifient du temps, de l'argent et de l'Ă©nergie pour lutter contre ce mal parmi tant d'autres Ă  travers le monde. S'ils ne rĂ©ussissent pas aujourd'hui, ils rĂ©ussiront demain. Nous devons continuer Ă  nous battre pour un monde meilleur pour tous les hommes - chacun contribuant un tout petit peu Ă  sa manière. Je vous salue tous -  AfricaLog

 

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