Volodymyr Zelensky devait sa notoriĂ©tĂ© mondiale Ă une conversation tĂ©lĂ©phonique controversĂ©e avec l’ex-prĂ©sident des États-Unis Donald Trump, qui tentait d’obtenir du prĂ©sident ukrainien nĂ©ophyte une enquĂŞte afin d’embarrasser son rival Joe Biden. Mais depuis l’invasion russe, il se sublime en chef de la rĂ©sistance, en particulier sur les rĂ©seaux sociaux.Â
Présenté par ses détracteurs comme une marionnette à la merci des États-Unis et de la Russie, l’ancien acteur comique devenu chef d’État en 2019, à 44 ans, a fait taire les critiques par sa capacité à incarner la détermination de son peuple face à la supériorité militaire de Moscou.
«Pas de panique, nous sommes prêts pour tout, nous allons vaincre», a-t-il lancé à ses concitoyens jeudi dernier au matin dans un message vidéo sur Facebook, quelques heures après les premières frappes russes et la déclaration de guerre de Vladimir Poutine.
Le lendemain, il est apparu, entouré de ses collaborateurs, devant le bâtiment de la présidence dans une nouvelle vidéo pour montrer qu’il se trouvait bien à Kiev, sans gilet pare-balles ni casque, au moment où les dirigeants occidentaux, l’estimant directement visé, envisageaient pour lui des portes de sortie.
Chaque jour, il s’affiche pour appeler à tenir la capitale, pour balayer les rumeurs de reddition imminente ou encore pour saluer, dimanche, la formation d’une «coalition internationale» pour soutenir l’Ukraine par l’envoi «d’armes, de médicaments, de nourriture, de carburant et d’argent».
Au prĂ©sident des États-Unis, Joe Biden, qui lui offrait son aide pour quitter le pays si nĂ©cessaire, il a rĂ©pliquĂ© «avoir besoin de munitions, pas d’un taxi». Â
Ce type de bravade lui a valu, outre l’«admiration» de nombreux commentateurs sur Twitter partout dans le monde, «sur les réseaux sociaux ukrainiens, depuis quelques jours, une reconnaissance de leader de la nation», souligne la chercheuse franco-ukrainienne Valentyna Dymytrova, maîtresse de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Lyon 3.
“On pensait qu’il “n’avait pas de couilles”, et maintenant, on dit qu’il “a des couilles de plomb”.
Par son omniprésence sur les réseaux sociaux, il crée aussi un «décalage par rapport aux stratégies du président Vladimir Poutine, dont les apparitions sont assez rares, les formats communicationnels, très longs, dépassant une quarantaine de minutes», ce qui évoque la «vieille école» soviétique, fait remarquer Valentyna Dymytrova.
« Le contraste est frappant : M. Zelensky est toujours debout, rarement assis, il est toujours dynamique et non pas statique, à la différence de M. Poutine, souvent assis à sa table, même si le décor est différent », poursuit-elle.
L’historien britannique Andrew Roberts, auteur d’une biographie de Winston Churchill, trouve à M. Zelensky des accents du premier ministre britannique lors de la Seconde Guerre mondiale.
Parmi les similitudes entre les deux dirigeants, le professeur au King’s College de Londres cite, l’«incroyable courage personnel» de M. Zelensky, sa «capacité à se connecter directement à son peuple» et «sa conviction inébranlable en la victoire finale».
Face à lui, Vladimir Poutine lâche ses coups. Il a ainsi qualifié le président de l’Ukraine et son gouvernement de «clique de toxicomanes et de néonazis», malgré les origines juives de Volodymyr Zelensky et le fait que le russe soit sa langue maternelle.
Le rival et prédécesseur de M. Zelensky, Petro Porochenko, raillait d’ailleurs sa piètre connaissance de la langue ukrainienne.
L’élection en avril 2019, après une campagne éclair sur les réseaux sociaux, de ce comédien interprétant dans une série à succès un professeur d’histoire honnête, mais naïf, arrivé au pouvoir par hasard, aurait pu relever de la farce ou de la ruse de l’Histoire.
D’autant que, face aux autres chefs d’État, Volodymyr Zelensky a d’abord paru emprunté. Ses promesses de régler le conflit dans l’est du pays avec les régions séparatistes prorusses ou de lutter contre la corruption semblaient sonner creux, et sa gestion de la pandémie de COVID-19 était très critiquée.
Mais l’affrontement avec Moscou, qui place l’Ukraine au centre de la plus grave crise russo-occidentale depuis la fin de la guerre froide, l’a assurément fait changer de statut. - AfricaLog avec agence