Par Ahmadou Hamzah Bah
Moussa Dadis Camara, né en 1964 à Koulé, dans la région forestière, est le chef de la junte militaire guinéenne. Militaire de formation, président du conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD). Arrivée au pouvoir par un putsch suite à la mort de Lansana Conté qui a dirigé la guinée de 1984 à 2009. Blessé à la tête le 3 décembre 2009 par son aide de camp, lieutenant Aboubacar Sidiki Diakité, il a été hospitalisé au Maroc.
Etudes
Il fait ses études primaires et secondaires à N'zérékoré, sanctionnées par un baccalauréat en sciences mathématiques au lycée Samory Touré. Puis, en 1986, il intègre l'université Gamal Abdel Nasser de Conakry, et obtient, en 1989, une licence en économie et finance.
Formation militaire
En 1990, Moussa Dadis Camara intègre l'armée guinéenne, et poursuit sa formation à la base à Kindia à 137 km de la capitale. Six ans plus tard, il suit des cours d’officier à Dresde, puis obtient un brevet de chef de section en gestion à Brème (Allemagne), et intègre une brigade franco-allemande. À son retour de l'Occident, en 1999, il devient intendant-adjoint au sein des forces des Nations Unies pour la Sierra Leone (UNAMSIL). De 2000 à 2001, il est le chef de la Section Essence à la direction générale de l'Intendance militaire des armées de Guinée. Il repart en Allemagne en 2004, et effectue des études en capitainerie d’intendance et de logistique à l’Ecole d’Infanterie de Hambourg, puis suit des cours pratiques de troupes aéroportées d'où il obtiendra un brevet de parachutiste-commando. Entre 2005 et 2007, Moussa Dadis Camara exerce le poste de Chef de section des Essences et Ravitaillement à l'Intendance militaire des forces armées, puis, en 2008, celui de directeur général des Essences et Lubrifiants. Entre temps, il suit des cours à l'État major à l'École militaire inter-armée (EMIAG), en Guinée.
Arrivée au pouvoir
Quelques heures après l'annonce de la mort de Lansana Conté, deuxième président de la République de Guinée, le capitaine Camara, jusqu'alors inconnu du grand public, apparaît à la radio-télévision guinéenne pour annoncer la suspension de la constitution et de toutes les institutions républicaines ainsi que la dissolution du gouvernement. Il prononce un discours à caractère social, dénonçant le désespoir profond du peuple de Guinée, la complicité des dignitaires du pouvoir dans le pillage des ressources du pays et leur incapacité à fournir à la population les services de base.
Le 23 décembre, il est porté à la tête du CNDD. Le lendemain, les forces armées le désignent président de la république, Camara promet des élections « libres, crédibles et transparentes » en décembre 2010 Comme promis à la prise du pouvoir, Moussa Dadis Camara nomme quelques semaines Kabinet Komara Premier ministre et chef du gouvernement.
Suite à la rencontre entre le CNDD et le secrétaire d'État français à la Coopération Alain Joyandet, le 4 janvier 2009 , le capitaine Moussa Dadis Camara réitère l'engagement de la junte à organiser des élections libres et transparentes, auxquelles ni les membres du CNDD, ni les membres du futur gouvernement de transition ne seront candidats, à la fin décembre 2009. Cependant en avril 2009, Dadis Camara menace de se présenter à la présidentielle de décembre 2009 si les leaders d'opinion ne cessent de s'« acharner » contre le CNDD. À son arrivée au pouvoir, la Guinée, selon les populations, était considérée comme l'une des plus grandes plaques tournantes de la drogue de la sous-région ouest-africaine Dadis Camara explique que « La drogue cause un énorme préjudice non seulement au peuple guinéen, mais à tous les opérateurs économiques. C'est pourquoi, j'ai décidé de la combattre pour redorer l'image de marque de mon pays ». Afin d'attirer les investisseurs, le Président guinéen cherche à rassurer les opérateurs économiques. Ainsi les interpellations se multiplient à Conakry, impliquant des protégés de l'ancien régime autoritaire tels que Ousmane Conté le fils ainé de l'ex-président, Saturnin Bangoura le beau-frère du Général Lansana Conté ou encore Lansana Camara, fils du Général Kerfalla Camara (ancien chef d’Etat-major général des forces armées guinéennes). Ces multiples arrestations de hauts fonctionnaires ou encore officiers supérieurs valent à Dadis Camara l'estime de son peuple voyant en cela la volonté de rompre avec la culture de l’impunité cultivée depuis longtemps et la corruption généralisée. La lutte contre les narcotrafiquants sera médiatisée avec des procès télévisés contribuant à la propagande du CNDD digne d'un régime dictatorial. Même si Moussa Dadis Camara est considéré actuellement par l'ONU comme un acteur important dans la lutte contre le narcotrafic en Afrique de l'Ouest, le problème de l'absence de chiffres réels demeure. Le 8 Aout 2009, le président Moussa Dadis Camara reçoit en présence du président sénégalais Abdoulaye Wade l'oscar du Mérite du Conseil international des managers africains (CIMA) pour son combat contre les narcotrafiquants et pour la moralisation économique.
Massacre de septembre 2009
Le 28 septembre 2009, à la suite d'un meeting organisé dans l'enceinte du stade de Conakry, l'armée guinéenne tire à balles réelles sur les manifestants, occasionnant 157 morts selon les ONG, qui font aussi état de milliers de blessés et de nombreux viols. La communauté international a fermement condamné cette violente répression, et le président Camara explique cet événement par l'indiscipline de ses forces armées, et déplore le décès de « ceux qui l'ont amené au pouvoir ». Ce massacre engendre la démission du porte-parole du gouvernement et des ministres de l'Agriculture et de la Fonction publique, fait sans précédent en Guinée.
La France, par la voix de Bernard Kouchner, décide de suspendre sa coopération militaire avec le CNDD et demande, conjointement avec les Etats Unis, une enquête internationale. La Cour Pénale Internationale (CPI) donne une suite favorable à cette requête et la France appelle ses 2 500 ressortissants à quitter la Guinée en raison de la détérioration de la situation. Devant les pressions internationales, Moussa Dadis Camara affirme le 17 Octobre, n'avoir « peur de rien ». Mais le 21 décembre suivant, le rapport de la Commission d'enquête internationale estime qu'au moins 156 personnes ont été tuées dans la répression et que 109 femmes ou jeunes filles ont été violées, voire parfois mutilées. Les enquêteurs de l'ONU parlent de « crime contre l’humanité » et en imputent notamment la responsabilité à Moussa Dadis Camara, pour lequel ils réclament la saisie de la CPI.
Tentative d'assassinatSuite aux massacres du 28 septembre, des dissensions apparaissent au sein du CNDD. Le général Sékouba Konaté essaye de faire arrêter Toumba Diakité par le Capitaine Claude Pivi. Mais Dadis s'y oppose. Sous la pression de l'enquête internationale, Dadis Camara semble se désolidariser des responsables des violences.
Le 3 décembre dernier, alors que Sékouba Konaté est en voyage au Liban, Moussa Dadis Camara se rend au camp militaire "Koundara", base de son aide de camp et chef de la garde présidentielle. Toumba Diakité dans des circonstances à éclaircir, tire sur Dadis Camara et le blesse à la tête.
Probablement touché à la tête et au cou, il est transféré le lendemain à Rabat au Maroc, afin d'y être hospitalisé dans une « situation difficile mais pas désespérée », d'après le président burkinabé Blaise Compaoré. En attendant de plus amples informations, l'intérim est assuré par le n°3 de la junte, le général Sékouba Konaté; une récompense de 200 millions de fg en plus d'une villa est promise à qui retrouvera Aboubacar Toumba Diakité ou donnera des informations pouvant le localiser.
Toumba, quant à lui, accuse Dadis Camara d'avoir commandité les massacres et d'avoir voulu lui rejeter la responsabilité, et affirme avoir aidé des opposants à échapper aux violences, version confirmée par François Lounceny Fall, ancien Premier ministre et président du FUDEC.
Le 13 janvier 2010, les médias étrangers annoncent que le chef de la junte guinéenne est « lucide et parle », aux dires de la présidence burkinabé. Le capitaine Moussa Dadis Camara aurait quitté Rabat, le mardi 12 janvier 2010 en fin d'après-midi, où il était hospitalisé depuis le 4 décembre dernier. Son avion se serait posé à 22h30, heure locale, à Ouagadougou. On ne sait pas si la capitale burkinabé est la destination finale ou un simple transit, Moussa Dadis Camara semblant souhaiter revenir en Guinée. Il ne s'est toutefois pas adressé aux médias durant les cinq semaines de sa convalescence, accréditant les rumeurs selon lesquelles son état de santé ne lui permettrait pas de retrouver son rôle à la tête du pouvoir en Guinée.
Ce vendredi 15 janvier 2010, un accord a été signé à Ouagadougou entre le général Konaté, le capitaine Dadis et le président burkinabé Blaise Compaoré. Dans cet accord le chef de la junte Moussa dadis Camara a accepté de continuer sa convalescence au Burkina et le général Konaté doit continuer la transition pour 6 mois. C’est un départ rassurant pour plus d’un guinéen.
Une synthèse d’ Ahmadou Hamzah Bah, correspondant d’AfricaLog en Guinée.