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Hypocrisie diplomatique

Feb 22, 2010

L’Union africaine (UA) ne manque pas d’air. 24 heures après le coup d’Etat qui a renversé jeudi le président nigérien Mamadou Tandja, l’organisation panafricaine a en effet condamné la prise du pouvoir par la force, suspendu Niamey et enjoint les nouvelles autorités de débarrasser le plancher au plus vite. Enferrée dans ses principes, l’UA n’avait en fait pas le choix, puisqu’elle a déclaré hors-la-loi les putschs depuis son sommet d’Alger 1999.

Ce qui, dans les faits, n’a jamais dissuadé les auteurs de pronunciamentos qui, à la force du poignet et à la fermeté du jarret, s’emparent de la chose avant de passer un coup de vernis démocratique. Et les voilà à nouveau politiquement corrects et fréquentables, admis donc aux raouts des princes qui nous gouvernent.

Dans le cas nigérien cependant, l’oukase du “Chinois” d’Addis doit n’être que de pure forme et de principe, pour ne pas dire qu’il procède d’une grosse hypocrisie diplomatique. Tout comme les récriminations de ce qu’on appelle pompeusement “la communauté internationale” (Etats-Unis et Union européenne en tête) qui manquent parfois bigrement et de consistance et de constance.

Car tous ont vu comment l’homme du tazartché, à ses risques et périls, a violé toutes les règles pour terminer ses chantiers, dissolvant les institutions républicaines dès lors qu’elles n’étaient pas dociles, embastillant opposants et journalistes, narguant ou méprisant tous ceux qui lui soufflaient le bon sens et la raison.

Le conseil extraordinaire des ministres qu’il avait rĂ©uni le jour de sa perte, et au cours duquel il a Ă©tĂ© alpaguĂ© comme dans une souricière, n’était-il pas destinĂ© Ă  entĂ©riner la dĂ©cision de quitter la CommunautĂ© Ă©conomique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), coupable Ă  ses yeux de ne pas le suivre dans ses errements ?

Alors on ne va se mettre à pleurer pareille forcené du pouvoir, emporté non par un coup d’Etat mais plutôt par la tripatouillite aiguë dont il souffrait. N’allez donc pas presser les sauveurs du Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSRD), laissez ces militaires tranquilles et ne nous parlez pas d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel normal.

De quel ordre constitutionnel parle-t-on au juste ? Celui de la VIe RĂ©publique, accouchĂ© dans la douleur, la forfaiture et le dĂ©sordre institutionnel ; ou celui de la Ve qui Ă©tait censĂ© ĂŞtre inviolable jusqu’à ce que Tandja administre la preuve du contraire ? Allons !

Allons ! Faut pas charrier. Avant de faire des imprĂ©cations a posteriori, faites d’abord de la prĂ©vention a priori en empĂŞchant tous les tripatouilleurs du continent au dĂ©sir d’éternitĂ© de modifier Ă  leur guise les règles du jeu dĂ©mocratique pour s’éterniser aux affaires comme si leur pays sombrerait avec eux s’ils venaient Ă  disparaĂ®tre.

Quelque part, les putschistes nigĂ©riens ont mĂŞme rendu, par cette Ĺ“uvre de salubritĂ© publique, un Ă©norme service Ă  la CEDEAO et Ă  l’UA en dĂ©goupillant une situation bloquĂ©e du fait de l’ex-maĂ®tre de Niamey. En rĂ©alitĂ©, on imagine que dans le secret de leur chaumière, beaucoup, qui condamnent du bout des lèvres, doivent rire sous cape et se dire : “c’est bien fait pour sa gueule”. HĂ©las, ils ne peuvent profĂ©rer publiquement pareille hĂ©rĂ©sie. Qu’est-ce qu’il est dur le mĂ©tier de diplomate ! Pour eux, nous serons donc la bouche de l’âne . – L’observateur Paalga


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