Opinion de Alpha Raphiou
Alors que tout le monde s'attendait et s'attend encore à ce qu'un miracle se
produise en Guinée, ce pays ne cesse pas de faillir à sa réputation de nation
aux occasions et aux opportunités ratées. Ce qui se passe actuellement dans la
première république francophone d'Afrique noire qui doit fêter ses 52 ans ce
2 octobre 2010 illustre a merveille la déchéance et le particularisme maléfique
qui la caractérisent.
Le mal proviendrait-il du "NON SYMBOLIQUE" de la Guinée au referendum proposé
par le général De Gaulle en 1958 ouvrant la voie à l'autodétermination? où tout
simplement à une mauvaise gestion de l'indépendance? sous le guide de Sékou
Touré, la Guinée fut la seule colonie française à rejeter le 28 Septembre 1958
le projet de communauté offert aux anciennes possessions coloniales françaises
en Afrique sub-saharienne.
En choisissant l'indépendance immédiate, déclarée le
2 octobre 1958, le pays de L'Almamy Samory Touré, Alpha Yaya Diallo, Kissi Kaba
Keita, L'Almamy Bocar Biro, Zebgela Togba...prenait ainsi une voie inconnue,
solitaire et semée d'obstacles dans sa quête de liberté, de dignité, de
prospérité et d'émancipation. Pour beaucoup le choix de la Guinée était purement
impulsif et simplement irréfléchi dans la mesure où l'indépendance était
inévitable vu les changements qui s'opéraient à cette époque de l'histoire de
l'humanité.
La bipolarisation du monde désormais sous le contrôle de l'Union Soviétique et
des Etats Unis ne permettait plus aux puissances coloniales d'alors de maintenir
leur hégémonie sur les pays du tiers monde dont les sacrifices et l'apport
durant la seconde guerre mondiale furent énormes. Le réveil des consciences et
la légitime aspiration de liberté et de souveraineté étaient les forces motrices
du changement inéluctable qui s'annonçait.
En effet choisir le "OUI" ou le "NON" n'était qu'un piège ou un « set up », car
l'indépendance était à la portée de celui qui voulait la prendre. Cependant les
choix et les méthodes d'obtention de cette indépendance étaient attachés à
certaines conditions imposées par la métropole qui pesèrent et pèsent encore
lourdement sur le destin des nations Africaines. La Guinée est un parfait
exemple des conséquences néfastes du choix offert ou du piège tendu par l'ancien
colonisateur la France. Cette dernière tira toutes les leçons de la défiance du
jeune Etat à son égard et n'hésita pas à lui barrer la route.
Depuis 1958 la Guinée tente, délicatement de prouver ou de rectifier son choix dans la douleur,
dans la confusion, bref dans la désorientation.
Passant d'une dictature civile (26 ans) sous Sékou Touré qui disait a qui veut
l'entendre que le système démocratique guinéen était plus développé que celui de
la France lorsqu'à son époque le multipartisme était inexistant et banni, la
libre entreprise interdite, les opposants politiques traqués, harcelés, emprisonnés ou tués
dans des conditions absurdes. Le père de l'indépendance
guinéenne laissa son pays dans l'incertitude ouvrant la porte à une dictature
cette fois ci militaire sous le leadership de Lansana conté «président-paysan»
qui ignorait tout de la gestion moderne d'un Etat. Son incompétence, son manque
de leadership ouvrirent la porte à une corruption poussée et à une mal
gouvernance indescriptible ayant conduit la Guinée vers une paupérisation
chronique accompagnée de graves violations des droits de l'homme.
Cette autocratie fut suivie par le règne éphémère mais comique et traumatique du
capitaine Moussa Dadis Camara confirmant ainsi le naufrage du "navire Guinée"
sauvé par une bouée de sauvetage offerte par les accords de Ouagadougou propulsant
le Général Konaté, Jean Marie Dore et Rabiatou Diallo au milieu du cirque pour
continuer à amuser la galerie.
Ce spectacle de transition riche en bondissements
et rebondissements entretenus par Cellou Dalein Diallo et Alpha Condé les deux
finalistes d'une élection présidentielle supervisée par une CENI incompétente et
contestée, prise en otage par les intérêts égoïstes des uns et des autres sous
une médiation du tombeur de Thomas Sankara, Blaise Compaoré du Bukina Faso et
financée par une communauté internationale comprenant mal le paradoxe guinéen où
justement voulant contribuer à mettre fin a celui ci.
Le Général Président intérimaire, après avoir suscité un grand espoir chez ses
compatriotes et au sein de la communauté internationale serait-il sur la voie de
décevoir? Le flou et l'incertitude qui entravent la tenue du second tour de la
présidentielle pour départager Mr Cellou Dalein Diallo et le Pr. Alpha Condé
commencent à créer le doute sur la sincérité du véritable maitre de cette
transition guinéenne.
Après 52 ans d'indépendance vécue dans la tyrannie et l'anarchie, le peuple de
Guinée est plus que déterminé à réécrire son histoire, mais il se heurte
toujours au manque de leadership, de vision et d'amour vrai à son égard pour
être à la hauteur de ce qu'il devait être. Aujourd'hui nous savons que la Guinée
est malade, nous savons aussi que tout le monde est a son chevet
l'encourageant à prendre le médicament qu'il faut pour se guérir, mais les
forces du mal l'en empêchent. Pourquoi cette difficulté dans l'instauration d'un
Etat de droit pour un développement harmonieux? Pourquoi en Guinée la démocratie
semble être un rêvé utopique non réalisable? Ceux que la Guinée inspira hier,
sont ceux qui, maintenant l'encouragent à changer et à rejoindre le concert des
nations africaines démocratiques pour contribuer à redorer l'image de notre
continent dans ce 21 siècle.
Où sont la dignité et la fierté guinéenne pour connaitre enfin le sursaut
national tant souhaité et attendu pour honorer nos héros, nos martyrs, consoler
nos victimes et sécher les larmes de notre peuple. La Guinée ne doit pas rater
ce rendez avec l'histoire. Le pays qui donna le ton en 1958 ne doit pas être à
la traine, mais à la première place pour montrer au reste du monde une fois de
plus qu'il à la capacité de changer et de mettre fin à ce qui semble être un
échec perpétuel.