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Guinée: Du repli identitaire à l’irrédentisme territorial

Dec 07, 2010

Opinion de Mohamed Kaba

D’ores et déjà il faut souligner le caractère difficile du sujet à traiter. Même en temps normal cette notion d’ethnie demeure extrêmement sensible. Elle l’est encore plus dans un contexte politique dominé par la violence et la contestation. Plus effrayant encore que cela puisse être, quand une élite
politique prétendument intellectuelle manipule le peuple, son peuple, dirais-je son ethnie à des fins politiques. L’ethnicité en politique en Guinée nous mène, et cela depuis longtemps, vers une catastrophe.
Aujourd’hui, pour toute solution à la conquête du pouvoir, certaines personnes qui sévissent sur des sites internets incitent au repli identitaire et à l’irrédentisme. Voici des facteurs politiques irrationnels, dangereux, qui nous dirigent vers non seulement une guerre civile, mais bel bien vers celle ethnique qui n’a d’autres justifications que la haine de l’autre, la haine tribale. Celle-ci est plus atroce, systématique et sans fin. Elle couve, s’embrase et ne s’arrête plus. Une guerre, ses géniteurs savent peut-être quand elle va commencer, mais ne mesurent ni les dégâts ni ne connaissent la fin.

Précisons notre analyse, la Guinée, notre pays, traverse un période de turbulence et d’instabilité que l’on voudrait bien passagère à condition de choisir la voie démocratique, et donc pacifique. L’occasion ? Nous l’avons dès maintenant, elle se déroule sous nos pieds. Après un demi-siècle de dictatures de toutes sortes, nous avons enfin cette chance d’asseoir un système démocratique, qui, sans être parfait, a la vocation de se perfectionner au fil du temps. Les pays les plus avancés en matière de
démocratie ne sont pas exempts d’erreurs et de difficultés. La Guinée est un Etat jeune avec une démocratie à peine naissante. A notre sens, il faudra plutôt l’aider à sortir des sentiers battus que de l’enfoncer dans ses tares. Depuis des lustres cette nation stagne, patauge, essaye de se relever. Mais vainement elle est restée à genou.

La Guinée, notre pays, bien que malade, est chère à tous, sans aucun doute. Mais avons-nous fait ou encore faisons-nous les actes nécessaires pour sa guérison ? J’en doute. Jusque-là mes compatriotes ne se sont pas montrés à la hauteur du lègue de nos aïeux. La grandeur d’une nation se mesure par les actes des hommes et des femmes qui la composent. Ceux-ci ont un projet de société en commun, puisqu’ils sont liés par une histoire commune et une culture harmonieuse, malgré les différences. La nation est nécessairement un idéal à atteindre, donc une construction transcendantale. Elle va au delà des clivages ethniques, religieux et culturels. Mais, en Guinée, cet idéal auquel nous aspirons n’est certainement pas pour demain, tant son élite politique et intellectuelle est décevante. (Cette élite pour laquelle les jeunes guinéens vouent aujourd’hui une admiration et un respect. Mais quand l’élite tombe dans un silence insidieux et laisse la place à une horde de médiocres qui s’acharnent sur le net, cela relève de la lâcheté. Des sites internets dangereux pour la paix, la coexistence pacifique et harmonieuse des populations du pays.

Aujourd’hui, dans le paysage médiatique guinéen- enfin s’agit-il de médiat normal - un site sort du lot et brille par de la haine, de l’hystérie et des balivernes avancées par des gens qui se sont donnés une vocation, un travail, une noble mission, celle de mettre la Guinée en morceaux, de faire voler le pays en éclats. L’incitation au repli identitaire, à l’irrédentisme et, même, à la Guerre ethnique. En somme, l’apologie de la partition de la Guinée, notre Guinée à tous, notre chère Guinée. Le site en question est
www.guineeactu.com . Un site au départ assez attrayant par ses critiques acerbes, comme beaucoup d’autres du genre, par ailleurs. Mais au fil du temps et des pages et au grée des informations, l’on est envahi par un sentiment nauséabond qui nous asphyxie. Les gourous du site sont omniprésents : Un certain Seydou Nour Boucum est le maître d’œuvre de la conception qui appelle tous les peuls à rentrer au Fouta. Il fait allusion à l’Erythrée, à El hadj Oumar Tall du Podor, si ce n’était que cela. Ici M.Boucoum devient un véritable Theodor Herzl ou Ben Gorion, théoriciens du sionisme. Un sionisme peul qui doit naître dans le Fouta ! Les Palestiniens y seront certainement les Daillonkes.

Ce que M. Bocoum oublie, c’est que ce Fouta est un patrimoine national de la République de Guinée, unique et indivisible. La Guinée est un tout, un entier. Il encourage une réunion des hal pulars en Belgique, réunion convoquée par un illuminé, un certain Sadio Barry, pour y tenir une « déclaration de Balfour ». Et sur ce site d’autres personnages encore plus lugubres interviennent, comme une Biliguissa de quelque part au Canada, qui parle d’une fédéralisation de la Guinée, precedee d’une autonomie des quatre régions naturelles du pays. Nous sommes face à d’une aberration politique. Il faut être quand même intelligent; aucune région de la Guinéen n’a négocié son entrée dans une quelconque union ou fédération d’où il faudrait s’y retirer ensuite. Au départ, l’UFDG était un parti politique national ouvert à tous les Guinéens, comme tous les autres partis du pays, du reste. Malheureusement nos partis politiques se sont progressivement mutés en partis à caractères ethniques. Mais il se trouve, fort heureusement, que la plupart des partis ont compris cette situation. Et pour y remédier, ils se sont joints pour former le mouvement «Arc-en-ciel » Ce qui a donné une coloration multiethnique à la victoire
d’Alpha Condé. Une victoire nationale. C’est cela qu’il faut reconnaître. Des patriotes qui se sont hissés au-dessus de l’ethnie pour faire valoir leur conviction politique, et donc démocratique. Ici, nous rendons hommage aux hommes et femmes qui ont fait montre de courage et patriotisme en transcendant l’ethnie pour ne considérer que l’action politique. Nous citons sans hésitations Rougi Barry, Ousmane Bah, Kassory Sylla, Papa Coly Kourouma, Sidia Touré et Abe Sylla etc... L’ethnie n’était présente dans
leurs discours, peu importe les raisons de leurs alliances, ils furent chacun à son niveau, des patriotes dans cette épreuve.

Notre pays n’a que trop souffert. Les différentes dictatures l’ont meurtri. Il faut être honnête, Sékou Touré et son régime ne nous ont pas fait que du bien. Personne de peut nier sa répression contre les peuls, mais peut-on oublier Cheytanne 75 contre Kankan ? Peu de familles de cette ville ont échappé à la
l’enfer de la révolution. Des Boutiques fermées, le commerce interdit et les grandes familles appauvries et affamées et ce fut l’exode vers les pays voisins. Ce pan de notre histoire est très ignoré. La vindicte qui s’est abattue sur les Malinkés aux premières heures du régime de Lansana Conte, à la suite du présumé coup d’Etat de Diarra Traoré, et du massacre d’officiers de cette ethnie est encore présent dans les esprits. Ceux-ci se sont-ils victimisés et ont-ils cherché à se retirer en Haute- Guinée pour se
soustraire de la Guinée ? Non ! Nous ne cautionnons aucunement les violences anti-peules à Siguiri et à Kouroussa. Nous estimons que le gouvernement a le devoir de protéger les citoyens et leurs biens. Le rapt de citoyens non peuls en Moyenne Guinée est tout aussi condamnable.

La violence militaire en guinée n’a pas de connotation ethnique. L’armée guinéenne a toujours brillé par ses lacunes, sa violence et son manque de formation. Peu importe les victimes, cette armée a toujours été le bourreau du peuple. C’est pour cette raison que le président Alpha doit s’atteler à sa réforme.

Aujourd’hui notre combat se trouve ailleurs, c’est celui de la démocratie et du développement qui doivent continuer. Le renforcement de nos institutions doit être un combat singulier. Nous avons surtout besoins d’institutions fortes, plus que des hommes exceptionnels. Il nous faut la foi en elles. Les institutions républicaines fortes nous donnent toutes les possibilités de droit et de démocratie. Nous terminons notre articles par cette citations d’Ernest Renan qui dit ceci: «Ce qui constitue une nation, ce n'est pas de parler la même langue, ou d'appartenir à un groupe ethnographique commun, c'est d'avoir fait ensemble de grandes choses dans le passé et de vouloir en faire encore dans l'avenir»

Chers compatriotes, nous profitons de cette tribune pour lancer un appel à tous les patriotes convaincus, de se mettre en contact avec nous pour donner naissance au mouvement « TOUCHE PAS MON PAYS ». Ce mouvement aura pour mission la consolidation de la paix et l’unité nationale, la lutte contre l’ethnicité et la préservation de l’intégrité de la Guinée Une et Indivisible.

Mohamed Kaba
Historien et journaliste.
Denver Colorado USA.
Mkaba98@gmail.com
001720 690 8877

 

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