D'intenses combats ont fait rage dimanche aux portes du site pétrolier de Brega (est) entre les rebelles et les forces loyales à Mouammar Kadhafi, affaibli par une nouvelle défection dans son entourage.
Si son armée résiste aux assauts des rebelles sur le terrain, le pouvoir libyen a connu un nouveau revers politique et diplomatique avec la démission d'un conseiller du colonel Kadhafi, Ali Tikri, doyen des diplomates et ancien "M. Afrique" du dirigeant libyen.
Ce diplomate de haut rang, ancien ministre des Affaires étrangères et des Affaires africaines, ambassadeur de Libye à l'ONU, n'a toutefois pas dit s'il rejoignait le camp des rebelles, a indiqué la Ligue arabe au Caire.
Le vice-ministre libyen des Affaires étrangères et des Affaires européennes, Abdelati Laabidi, a pour sa part rencontré dimanche le Premier ministre grec Georges Papandreou.
Venu à Athènes à la demande de Tripoli, l'émissaire du colonel Kadhafi a transmis un message faisant apparaître que le régime "cherche une solution" au conflit en Libye, "selon les mots utilisés par l'envoyé libyen", à qui la partie grecque a rappelé les conditions contenues dans la résolution 1973 de l'ONU, a déclaré dans la soirée le chef de la diplomatie grecque, Dimitris Droutsas, dans un communiqué.
M. Laabidi était arrivé dimanche matin en voiture en Tunisie par le poste-frontière de Ras Jdir, empruntant le même chemin que le chef de la diplomatie libyenne Moussa Koussa le 28 mars. Deux jours plus tard, M. Koussa s'était envolé pour Londres où il annonçait sa défection.
Comme ces derniers jours, les combats à l'Est se sont concentrés toute la journée de dimanche autour du site pétrolier de Brega, à 800 km de Tripoli et à 240 km au sud de Benghazi, bastion de l'opposition, selon un journaliste de l'AFP.
Après s'être emparés de l'Université du pétrole, un énorme campus à l'entrée est de la ville, les rebelles ont dû se replier sous le feu des pro-Kadhafi.
De fortes explosions résonnaient en provenance des positions de ces derniers, tandis que des avions de l'Otan, dont les frappes aériennes ont freiné ces derniers jours la contre-offensive des forces loyalistes vers l'est, survolaient la région.
"La situation est bonne, nous sommes aux portes de Brega", a assuré un militaire se présentant comme un "colonel" de la rébellion mais refusant que son nom soit cité. "L'armée du dictateur se replie, nous aurons le contrôle de la ville sous peu".
Pour la première fois depuis le début de l'intervention internationale le 19 mars, neuf rebelles et quatre civils, dont trois étudiants en médecine, ont été tués vendredi soir par une frappe de l'Otan à une quinzaine de kilomètres à l'est de Brega, selon les insurgés.
L'Alliance atlantique, qui a pris jeudi le commandement des opérations militaires en soutien de la rébellion, a indiqué dimanche qu'elle continuait à enquêter sur cette possible bavure. Mais elle a en même temps rappelé que "si quelqu'un tire sur l'un de nos appareils, ils ont le droit de se défendre".
Selon un responsable politique d'Ajdabiya, à 80 km à l'est de Brega, un avion de la coalition a ouvert le feu sur un convoi de cinq ou six véhicules, dont une ambulance. Le pilote a sans doute pensé avoir été visé par les tirs de joie d'un rebelle à bord du convoi.
Dimanche matin, des avions français ont de nouveau détruit plusieurs blindés des forces pro-Kadhafi aux abords du port pétrolier de Ras Lanouf, à une soixantaine de km à l'ouest de Brega, selon l'état-major français.
Samedi soir, d'autres patrouilles avaient "détruit cinq véhicules blindés dans la région de Syrte", ville natale de Mouammar Kadhafi.
Une délégation de diplomates britanniques est arrivée samedi soir dans le fief rebelle de Benghazi (est) pour, selon Londres, "entrer en contact avec des personnalités, dont le Conseil national de transition" (CNT), organe représentatif de la rébellion.
Cette mission intervient près d'un mois après l'envoi d'une première délégation britannique le 6 mars à Benghazi, qui avait tourné court: les diplomates et les membres des forces spéciales britanniques qui la composaient, avaient été arrêtées par les insurgés peu après leur arrivée par hélicoptère et avaient dû quitter la Libye.
Sur le plan humanitaire, un navire affrété par l'ONG Médecins sans frontières (MSF) a quitté dimanche après-midi Misrata (200 km à l'est de Tripoli) assiégée et bombardée depuis 40 jours par les forces pro-Kadhafi pour Sfax, en Tunisie, avec 60 blessés à bord.
Un ferry turc est arrivé dimanche à Benghazi avec à son bord une équipe médicale, deux ambulances et deux tonnes de médicaments et d'équipements médicaux.
"Dieu est le plus grand", a crié une foule nombreuse alors que le bateau, qui avait à son bord 250 blessés rapatriés de Misrata, actionnait sa sirène.
La Turquie, seul pays musulman de l'Otan et important acteur diplomatique dans la région, a affirmé que cette mission avait reçu l'aval du colonel Kadhafi.
C'est précisément à la Turquie que va être adressée une pétition lancée pour obtenir la libération d'une femme qui affirme avoir été violée et torturée par des soldats de Kadhafi. La pétition, sur le site du mouvement Avaaz, a passé la barre des 500.000 signatures dimanche soir.
Le texte demande à Ankara d'intercéder auprès de Tripoli en faveur de cette jeune femme qui n'est plus apparue en public depuis qu'elle a fait irruption dans un hôtel de Tripoli le 26 mars pour alerter la presse internationale.
Les autorités libyennes affirment qu'Imane al-Obeidi est poursuivie pour "calomnie" mais qu'elle a été remise en liberté pendant l'enquête du parquet. - AFP