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France: République bananière?

Sep 19, 2011

Par Emmanuel Martin

 

L’affaire a fait grand bruit. L’avocat Robert Bourgi, souvent appelé le nouveau «
Monsieur Afrique » de l'Élysée, ayant hérité des réseaux Foccart, a dévoilé dimanche
11 septembre qu’il aurait convoyé des valises d’espèces entre 1997 et 2005 de pays
africains vers les bureaux du Président Chirac et de Dominique de Villepin. Outre
ces remises de financements occultes, que M. Bourgi évalue à 20 millions de dollars,
des cadeaux tels que des masques africains auraient aussi été remis à l’ancien
Président français et à son premier Ministre. Ces derniers ont porté plainte pour
diffamation. Bien sûr, comme Robert Bourgi, on peut être « surpris que Jacques
Chirac, frappé d'amnésie pour les affaires de la Mairie de Paris, retrouve
subitement la mémoire pour porter plainte contre [lui]».

Au beau milieu de l’affaire Clearstream, du procès Chirac et du mystère des
enveloppes de Mme Bettencourt, ce nouveau scandale permet à la classe politique
française de se distinguer à nouveau par son irréprochable probité. Bourgi n’est pas
un saint et il le reconnaît. Il affirme depuis longtemps qu’il y avait une «
diplomatie parallèle ». Pourtant, il n’est pas certain qu’elle ait cessé avec
Sarkozy, en dépit des annonces de ce dernier pour apparaître en Mr. Propre. On se
rappelle de l’affaire Bockel : c’est Omar Bongo qui nommait apparemment les membres
du gouvernement français ! Certains comme Jean-Pierre Probst, n’hésitent pas à le
dire : la Françafrique a toujours la vie dure. Pourtant la vie politique française
n’a-t-elle pas été « moralisée » depuis le début des années 90 ? La France
serait-elle une République bananière ?

Cette expression distille ce petit côté condescendant et raciste, cette touche
d’amertume liée à un passé colonial regretté. Elle désigne bien sûr une nation
corrompue comme on en trouve beaucoup en Afrique. Les français si sûrs de leur «
civilisation » illuminant le monde, ont pu faire usage de l’expression, un petit
sourire en coin, pour décrire, ce que sont devenues, « sans eux », bien des nations
africaines. Ces dernières, après les indépendances, se sont effectivement embourbées
dans le sous-développement. D’abord par choix du socialisme ou, grande tradition
française, de l’étatisme. Mais aussi parce que la France, ou plutôt ses dirigeants,
maintenaient en fait une relation corruptrice avec leurs homologues africains, afin
de financer la vie politique française.

Cette accumulation de scandales n’est qu’un signe de la manière dont fonctionne
notre démocratie. Mais toute notre démocratie. Car finalement, ce ne sont pas
uniquement quelques dirigeants très hauts placés et leur entourage parisien qui
bénéficient d'un système corrompu. On pense, récemment, à M. Guérini à Marseille ou
aux 42.000€ de pizza de la fédération PS à Montpellier… Toute notre démocratie est
gangrenée par l’immoralité dès qu’il s’agit d’argent public. Il suffit en fait pour
s’en convaincre de lire le best seller de Zoé Shepard : « Ab-so-lu-ment débordée, ou
comment faire ses 35 heures en un mois ». On y découvre comment les collectivités
territoriales ont aussi leurs « Rois fainéants » (à tous les étages de
l'encadrement), leurs gaspillages honteux et leur clientélisme scandaleux.

La France peut donc effectivement mériter d’être appelée une République bananière.
Et c’est d’ailleurs pour cela qu’elle est au bord de la faillite. Mais devinez qui
va devoir payer.

Emmanuel Martin est analyste sur UnMondeLibre.org.

Publié en collaboration avec UnMondeLibre.org

 

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